Arthur Rimbaud |
Información de contacto: Âme Âme |
E-mail: suicidal.bastard@gmail.com |
Baile de los ahorcados
En sombrío cadalso, manco amable, Bailan, bailan y bailan paladines, Los flacos paladines del demonio, Los esqueletos de los Saladinos. Monseñor Belcebú tira por la corbata De sus títeres negros que hacen muecas al cielo. Les asesta en la frente sonora zapatada, ¡Y bailan a las notas de un viejo villancico! Y a choques entrelazan sus flacos brazos largos: Como negros armonios, los pechos horadados Que apretaron antaño a gentiles doncellas, Ahora se entrellevan en un horrendo amor. ¡Viva, alegres danzantes que ya no tienen panza! ¡Ensayen las cabriolas, la tarima es muy grande! ¡Upa! ¡Que no se sepa si es baile, o si combate! ¡Rabioso Belcebú rasguea sus violines! ¡Duros talones! ¡Nunca sandalias han gastado! Casi todos perdieron sus camisas de piel: El resto no molesta y se ve sin escándalo. Albo fieltro la nieve pone a las calaveras. Sobre esas locas testas forma penacho el cuervo: Tiembla un trozo de carne en desnuda mandíbula: Girando en brega obscura, parecen paladines Muy tiesos que entrechocan sus armas de cartón. ¡Viva! ¡El cierzo rechifla en el baile de osambres! ¡La negra horca brama cual órgano de hierro! Lobos van respondiendo desde bosques violetas: A lo lejos el cielo es de un rojo infernal... ¡Eh, zarandéenme a estos fúnebres fanfarrones Que desgranan, bellacos, con gruesos dedos rotos Un rosario de amor con sus pálidas vertebras!: ¡Eh, difuntos señores, no estamos en un claustro! Y de pronto, en el centro de esa danza macabra, Salta en el rojo cielo un esqueleto loco, Caballo encabritado llevado de su impulso, Y sintiendo en su cuello aún la tiesa correa, Crispa sobre su fémur que cruje los meñiques Con chirridos que suenan a sardónicas risas, Y como un saltimbanqui que regresa a su carpa, En el baile rebota al son de los osambres. En sombrío cadalso, manco amable, Bailan, bailan y bailan paladines, Los flacos paladines del demonio, Los esqueletos de los Saladinos Arthur Rimbaud |
Bal des pendus Aus gibet noir, manchot aimable, Dansent, dansent les paladins, Les maigres paladins du diable, Les squelettes de Saladins. Messire Belzébuth tire par la cravate Ses petits pantins noir grimaçant sur le cie, Et, leur claquant au front un revers de savate, Les fait dancer , dancer aux sons d'un vieux Noel! Et les pantins chqués enlacent leurs bras grêles: Comme des orgues noirs, les poitrines à jour Que serraint autrefois les gentes damoiselles, Se heurtent longuement dans un hideux amour. Hurrah! Les gais danseurs, qui n'avez plus de panse! On peut cabrioler, les tréteaux sont si longs! Hop! qu'on ne sache plus si c'est bataille ou danse! Belzébuth enragé râcle ses violons! Ô durs talons, jamais on n'use sa sandale! Presque tous ont quitté la chemise de peau: Le reste est peu gênant et se voit sans scandale. Sur les crânes, la neige applique un blanc chapeau: Le corbeau fait panache à ces têtes fêlées, Un morceau de chair tremble à leur maigre menton: On dirait, tournoyant dans les sombres mêlées, Des preux, raides, heurtant armures de carton Hurrah! la bise siffle au grand bal des squelettes! Le gibet noir mugit comme un orgue de fer! Les loups vont répondant des forêts violettes: A l'horizon, le ciel est d'un rouge d'enfer... Holà, secouez-moi ces capitans funèbres Qui défilent, sournois, de leurs gros doigts cassés Un chapelet d' amour sur leurs pâles vertèbres: Ce n'est pas un moustier ici, les trépassés! Oh! voilà qu'au milieu de la danse macabre Bondit dans le ciel rouge un grand squelette fou Emporté par l'élan comme un cheval se cabre: Et, se sentant encor la corde raide au cou, Crispe ses petits doigts sur son fémur qui craque Avec des cris pareils à des ricanements, Et, comme un baladin rentre dans la baraque, Rebondit dans le bal au chant des ossements. Aus gibet noir, manchot aimable, Dansent, dansent les paladins, Les maigres paladins du diable, Les squelettes de Saladins. Arthur Rimbaud |